Portraits de la médiation numérique

Olivier Cambier, Le Logis des Jeunes (Cannes, 06)

Confesseur numérique

« On aime bien le concept de la pieuvre : on aime tout, on touche à tout.
C’est ce qui nous plaît, plein de public, plein de projets »

Le parcours professionnel d’Olivier se lit comme un triptyque : d’abord, successivement et aujourd’hui, tout à la fois technicien réseau, responsable de projet et animateur.

Au départ, c’est vers l’informatique qu’il s’oriente, après un DUT dans le domaine. Mais il se rend très vite compte qu’il est trop loin de ses attentes. Il ne se voit pas simple technicien ou administrateur réseau. Il s’égare un temps dans la grande distribution, 5 ans tout de même, mais s’y retrouve encore moins. Il obtient une licence en communication et en gestion de projet et part travailler pendant deux ans en collège en tant que professeur de technologie. Ce virage dans sa carrière lui permet de découvrir enfin une dimension qui fait sens à ses yeux : le social.
Il tombe un jour sur une petite annonce de Pôle Emploi : le Logis des Jeunes de Cannes recherche un animateur multimédia. « La fiche de poste correspondait exactement à ce que je recherchais : un peu d’informatique, un peu de social, un peu d’animation, auprès des jeunes ».

Depuis 2008, après 2 ans dans ce poste d’animation, il est devenu chargé de développement numérique. En plus de l’animation, il a plus de responsabilités, allant du développement de projet à la gestion du service, en passant par la maintenance réseau. Toujours dans la même logique, il complète à l’heure actuelle sa formation par un diplôme d’Etat dans le secteur socio-culturel dans le cadre d’une valorisation des acquis de l’expérience (VAE). « Donc 3 diplômes pour 3 fonctions ». L’ensemble, son parcours, sa formation et ses envies, forme au final un tout cohérent, qui lui permet de trouver un sens à son travail. Enfin !

En outre, cela répond à la diversité des besoins et des sollicitations. Si vous allez dans le bureau d’Olivier vous serez surpris par la multiplicité de post-it qui lui rappelle les nombreux bénéficiaires qui comptent sur lui. « C’est un peu schizophrène comme métier tout de même » dit-il en rigolant. D’abord, ce sont les résidents du foyer ; pas évident de les intéresser avec le turn-over À peine, sont-ils sensibilisés que le plus souvent ils sont amenés à évoluer vers d’autres horizons. Ensuite, il y a les extérieurs. Ceux qui fréquentent le Logis des jeunes sans y résider atteignent souvent un niveau de maîtrise des outils auquel on ne s’attend pas. Pour tous, le maître-mot est d’utiliser les technologies comme facteur de lien social. « On propose des services mais des services citoyens. On vient en profiter mais on a un contact qui n’est pas le même : ce sont des personnes qu’on accueille, pas des clients. »

Ce lien social avec les bénéficiaires supplée les difficultés qui peuvent exister dans la relation à l’environnement local. Le Logis des Jeunesest atypique sur un territoire qui ne l’est pas moins : il est difficile d’envisager des partenariats quand personne ne semble devoir les soutenir. Olivier déplore ainsi que l’Espace Régional Internet Citoyen (ERIC) soit uniquement identifié « en tant qu’outil, mais pas en tant que partenaire ». Chacun travaille dans son domaine sans lien évident avec les autres. Cette coupure existe d’autant plus qu’elle recouvre une coupure physique marquée par la voie ferrée entre la ville de bord de mer et la ville au-delà. Peut-être la rénovation à venir de la gare sera-t-elle l’occasion de mettre fin à cette vision d’une ville coupée en deux, traversée par une forme de méfiance qui perdure.

Pour dépasser les difficultés, Olivier croit à l’échange de bonnes pratiques : malgré ses contraintes, Olivier prend le temps nécessaire ; il s’y emploie, se déplace, répond aux sollicitations. Il ne trouve pas les partenaires dans sa ville. Alors, il va les chercher ailleurs : Tania du Hublot à Nice pour les projets plus culturels ; l’ERIC de Pertuis pour un projet e-toileurs ; un photographe professionnel et des infographistes pour le projet « les résidents s’affichent ».

Il y croit tellement qu’il souhaite faire évoluer son ERIC vers un espace de coworking. Ouvert sur son environnement, il se donne pour objectif de créer un espace dédié qui permette d’aider dans leurs projets des entreprises, des associations comme des individus, avec la volonté d’ouvrir leurs résidents vers de nouveaux horizons. Ce projet s’appuierait sur les réalisations déjà ancrées comme « l’école des projets » qui offre un accompagnement performant au service du développement de projets économiques et associatifs. D’une manière générale, pour Olivier, « l’évolution des ERIC en centre de ressources est indispensable ».

Et si l’on dit à Olivier qu’il fait de la médiation numérique pour faciliter l’accès à quelque chose de complexe dans une société où la place de la technologie nécessite de pacifier la relation que les hommes entretiennent avec elle, il sera d’accord. Médiateur et pacificateur, Olivier a trouvé le métier qu’il cherchait.


Le profil d’Olivier

Portrait réalisé dans le cadre l’Observatoire des TIC en région Provence-Alpes-Côte d’Azur (OBTIC) et du programme Espace Régional Internet Citoyen en partenariat avec l’association ARSENIC, le Laboratoire de Sciences Sociales Appliquées (LaSSA) et ITEMS International (AMO OBTIC).

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Posté le 2 juillet 2012 par Natacha Crimier

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