La vie hors du réseau : premières transformations

J’expérimente la vie sans Twitter, et aussi sans Instagram, sans Diaspora, sans Curious Cat et tous les autres (je n’ai gardé qu’un compte personnel sur Facebook, à mon vrai nom, où je ne suis pratiquement en contact qu’avec des gens proches – je n’accepte pas de requêtes « extérieures » – et que je connais depuis longtemps ; j’ai en revanche supprimé la page de Neil Jomunsi). 

C’est amusant. Enfin c’est un peu plus qu’amusant. Ça confine à l’expérimentation, ce qui est absurde quand on y pense. J’expérimente le fait de ne pas construire d’image publique au quotidien.

Car séparé de toute possibilité d’interaction à travers les réseaux sociaux, il me semble que c’est la « vie-sans » qui revêt un caractère expérimental, presque artistique. Et je m’en veux un peu, d’abord de ne pas l’avoir fait plus tôt, mais aussi de me sentir encore parfois si détaché de la réalité matérielle dans laquelle j’évolue pourtant. Je me servais principalement de Twitter comme d’un bloc-notes. Sitôt qu’une pensée ou un bon mot me traversait l’esprit, je la publiais avant d’en retourner sept fois le sens dans ma tête. Il m’arrivait fréquemment de dire des bêtises d’ailleurs, à vouloir trop vite publier. Ces pensées me viennent toujours, bien sûr, et j’ai encore le réflexe de me dire : « je vais le partager avec le monde entier ». Et puis je me rappelle alors des ponts coupés, de la dissolution progressive et programmée de Neil Jomunsi dans Julien Simon, et ce micro temps de détachement suffit à me faire réaliser que je pense parfois pour les autres avant de le faire pour moi. Je m’en veux encore. Me trouve idiot, stupide, victime de ma soif d’approbation. Cette pensée est très bien là où elle est, là où elle naît et meurt dans le même temps. Et si j’ai quelque chose d’intéressant ou d’important à dire, je l’écris ici, ou alors j’envisage d’en faire un livre. Ce n’est pas plus compliqué que ça. Je temporise, simplement. Je relativise aussi l’importance de nombreuses nouvelles, sujets d’actualité, querelles politiques. Quand on se coupe la possibilité de réagir à chaud, un changement s’opère aussi. Il faut dire que, contrairement à certaines et certains qui savent user de modération, j’avais le tweet compulsif.

Phénomène curieux (et pourtant prévisible), je refais attention depuis quelques jours à ce que postent mes « vrais » amis sur Facebook. C’est peut-être aussi ça, le deuxième effet : se remettre à penser localement, même à distance. Et je ne vous cache pas que quelque part, je trouve ça réjouissant.

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Via un article de Neil Jomunsi, publié le 28 novembre 2016

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