Du déchet à la ressource : il n’y a qu’un pas de côté

En 2030, les deux tiers de la population mondiale vivront en ville. Le défi du 21ème siècle est bien celui d’une urbanisation exponentielle et multiforme qui nous presse à trouver des modèles véritablement durable. Nous avons choisi d’aller regarder ce qui se passe au Brésil, là où la créativité est de mise pour gérer un enjeu de taille dans un pays où les villes se font très vite : la gestion des déchets. L’enjeu à la clé ? Rendre la ville viable, vivable, vivante même !

DES DÉCHETS ? PARDON, DES RESSOURCES

Direction Rio de Janeiro… Lucas Chiabi, fondateur de Ciclo Organico a 25 ans, et quel étrange rêve d’enfant que celui du conducteur de camions poubelles. Son initiative Ciclo Organico milite chaque jour pour la transformation des déchets organiques en nutriments et pour leur réinsertion dans les cycles de vie urbains. Depuis 2015, quatre cyclistes parcourent 16 quartiers de Rio et récoltent pas moins de 7 tonnes de déchets organiques mensuels auprès de 350 foyers, mais aussi de restaurants, d’écoles et de crèches. Après avoir été compostés, ces déchets sont redistribués sous forme d’engrais aux jardins, parcs, et potagers de la ville et de ses environs. Nous avons dit « déchets » ? « Ressources » aurait été plus approprié.

Ciclo Organico à Rio, mais aussi Re-ciclo à Porto Alegre, Brotei à Florianopolis ou encore Ecobalde à Campo Grande et Minhocaria à Sao Paulo… Autant d’initiatives brésiliennes qui auraient de quoi faire rougir nos métropoles occidentales. Car si l’urbanisation des pays en développement est l’un des défis majeurs de notre siècle, avec près de 90% de la croissance urbaine mondiale, elle offre des opportunités uniques d’inventer des villes plus durables. Et cette opportunité, nombreux sont les citoyens qui s’en sont emparés.

Natalia, en tant que fondatrice de l’entreprise Re-ciclo à Porto Alegre. Au quotidien, cette ville du Sud du Brésil génère 1 500 tonnes de déchets solides. Les déchets organiques comptent pour environ 50% de ces déchets et sont actuellement destinés à une décharge qui se trouve à Minas do Leão, à 130 km de la capitale : 90 trajets quotidiens soit un total de 20 000 km par jour, l’équivalent d’un tour du monde. Une inefficacité évidente des dépenses publiques et un impact environnemental négatif sur la région. Partant de ce constat, Nathalie a developpé Recyclo : des coursiers qui parcourent la ville pour récolter les déchets, les traiter et ensuite les redistribuer aux parcs de la ville. Re-cyclo se développe sur un principe de décentralisation, avec un découpage des zones de compost par quartier, qui permettrait à terme une couverture de la ville par les coursiers à vélo avec une distance parcourue n’excèderait pas les 20 kilomètres par jour. Une alternative à la gestion publique des déchets qui permet à la fois une réduction des émissions de gaz a effet de serre liés aux transport et à la décomposition des déchets, la création d’emplois locaux, et qui fournit également un argument au développement de l’agriculture urbaine et périurbaine locale.

CYCLE DE VIE URBAIN : ET SI L’ON SE RECONNECTAIT AU VIVANT ?

Soutenir la décentralisation des responsabilités en matière de gestion environnementale, c’est bien là une nouvelle piste de gouvernance pour nos villes. Des politiques fortes qui appellent surtout à la nécessité de travailler en partenariat avec le secteur privé, les secteurs associatifs et communautaires autour de l’optimisation des circuits de collecte de déchets et de la valorisation de la matière. Parce qu’on en est convaincu, la gestion des déchets est la responsabilité de tous.

Soutenir la décentralisation des responsabilités en matière de gestion environnementale, c’est bien là une nouvelle piste de gouvernance pour nos villes.

Si les impératifs de durabilité redéfinissent nos rapports entre la société et son environnement, on assiste à la création de nouveaux modes de régulation, à de nouvelles logiques territoriales, et surtout, à une redistribution des droits d’usages sur les ressources. En réintégrant les déchets organiques dans les cycles de vie urbains, Ciclo Organico ou Reciclo replacent le curseur de la gestion des déchets, mais aussi de la production alimentaire, à l’échelle des quartiers, des communautés et des familles, et redéfinissent les rapports de proximité et de création de ressources au sein de la communauté.

C’est peut être ce qui permettra à la ville de se recentrer sur sa vocation initiale : être avant tout un lieu de vie offrant à ceux qui y vivent la possibilité de s’inscrire pleinement au sein d’un territoire. Derrière cette décentralisation des responsabilités, c’est bien un changement d’échelle qui est promut avec à la clé, la possibilité pour les citoyens de se reconnecter au vivant. En d’autres termes, une nouvelle conception de la ville et de ce qui la compose : un écosystème dans lequel l’humain, le citoyen émancipé, et son environnement seraient des notions interdépendantes qui dépasseraient le simple cadre de la rationalité territoriale.

C’est peut être ce qui permettra à la ville de se recentrer sur sa vocation initiale : être avant tout un lieu de vie offrant à ceux qui y vivent la possibilité de s’impliquer pleinement au sein d’un territoire.

Un concept qui, loin de nier une certaine autonomie du social, considèrera que le changement sociétal ne pourra être envisagé sans considérer la relation des communautés humaines à leur environnement. Ce concept, loin d’être nouveau, peine pourtant encore à être reconnu et intégré à nos agendas politiques.

Notre souhait pour la ville de demain : qu’elle soit vivante et durable bien sûr, et surtout qu’elle se laisse transformer par les citoyens qui voient en elle abondance et opportunités.


Voz Orgánica est une association d’intérêt général fondée en 2016. Depuis mars 2017, l’équipe mène sa première expédition bio’urbaine : 10 mois en immersion au sein de communautés bio-résilientes d’Amérique Latine pour construire la ville organique de demain : productive, verte et vivante. 

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Via un article de Article Invité, publié le 29 août 2017

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