Qu’ils aient été un outil de travail, une façon de maintenir le lien social ou simplement un divertissement, les usages numériques ont occupé une place importante dans le quotidien des internautes bretons durant le confinement du printemps 2020. Nous faisons le point sur les habitudes de connexion des internautes durant cette période. Dans quelle mesure ont-ils intensifié leurs usages ? Tous les internautes se sont-ils tournés vers le numérique avec la même intensité ?
Une augmentation générale des usages numériques durant le confinement
Connexion aux mails
Les internautes bretons sont 94% à avoir échangé des mails pendant le confinement, un usage répandu comme le révélait déjà notre enquête CAPUNI 2019 [1]. Cependant, selon les cas, le mail a pu se révéler indispensable durant cette période et ce sont 73 % des internautes qui en ont fait un usage quotidien, contre 51% en 2019.
Près d’un internaute sur cinq (19%) s’est déclaré connecté en permanence à ses mails. Une tendance qui est, sans surprise, significativement plus forte chez les télétravailleurs [2](45%). Parmi les internautes qui ont dû consulter des mails, ils étaient 13% à le faire dans les 10 minutes suivant le réveil.
Connexion aux réseaux sociaux
La tendance semble similaire en ce qui concerne l’usage des réseaux sociaux. Ce sont en effet 74% des internautes qui sont présents sur les réseaux sociaux, ce qui représente une augmentation de 9 points par rapport à 2019. Là aussi une augmentation de la fréquence de connexion est à noter puisque 62% en ont un usage quotidien, contre 40% en 2019.
À noter que 13% des internautes sont connectés en permanence à différents réseaux sociaux et que les individus les plus concernés par une connexion permanente aux réseaux sociaux sont les plus jeunes (30% chez les 18 à 29 ans).
L’enquête révèle qu’une partie des internautes se connectait dès le réveil durant le confinement. Ainsi, 21% des internautes qui consultaient les réseaux sociaux, se connectaient dans les 10 minutes suivant leur réveil et c’est même la première chose qu’ils faisaient au réveil pour 4% d’entre eux (moins d’une minute après le réveil).
Usages informatifs
Le numérique a aussi été un moyen de s’informer et d’apprendre durant le confinement. 94% des internautes bretons ont effectué des recherches d’information “sur l’instant” en ligne (93% en 2019), ils sont 71% à le faire quotidiennement contre 45% en 2019. Ce sont les plus jeunes, les télétravailleurs et les personnes ayant un diplôme plus élevé qui ont le plus utilisé Internet pour rechercher de l’information durant le confinement. 18% des internautes qui suivent les actualités en ligne les consultent dans les 10 minutes suivant leur réveil.
Usages récréatifs
Enfin, une partie des divertissements se sont également translatés vers les écrans. Selon l’enquête CAPUNI passée en 2019, 44% des internautes déclaraient jouer en ligne dont 15% tous les jours ou presque. Durant le confinement, ils étaient 66% de joueurs et ce sont 20% des internautes qui ont déclaré jouer plus d’une heure par jour et 6% plus de trois heures par jour.
Connectés du matin au soir ? Une nécessité ?
Les réseaux sociaux mis à part, il n’y a pas eu d’évolution notable du nombre d’utilisateurs des différents usages étudiés. Néanmoins, les internautes qui les utilisaient déjà avant le confinement semblent s’y être connectés plus fréquemment pendant le confinement, parfois dès le réveil. Certains internautes ont favorisé le numérique au détriment d’autres activités, voire de leur sommeil durant le confinement. C’est en tout cas ce que révèle l’enquête CAPUNI crise : 17% des internautes ont déclaré perdre souvent du temps de sommeil pour passer du temps en ligne, et ce sont les internautes les plus jeunes (43% chez les 18 à 29 ans) qui sont les plus concernés. 14% des internautes ont souvent favorisé une activité en ligne plutôt qu’une activité quotidienne (tâches ménagères, vie familiale, etc.) Là encore, cette habitude est plus importante chez les plus jeunes (30% chez les 18 à 29 ans). Ces chiffres amènent à se poser des questions alors que la population des plus jeunes est aussi celle qui est le plus connectée a priori. Le manque d’activité de substitution a sans aucun doute contribué à renforcer la pratique numérique pour des loisirs, pour des interactions sociales, pour des relations affectives, pour des apprentissages mais elle pourrait également s’accompagner de conséquences sur la santé mentale et les relations sociales qu’il faudrait désormais étudier avec plus de finesse [3].
Hyper-connexion : quels internautes ont été les plus connectés durant le confinement ?
Les répondants de l’enquête ont été interrogés sur leur impression d’être plus, autant ou moins connectés durant le confinement. 40% des internautes ont ainsi déclaré avoir le sentiment d’avoir été plus connectés. Ce sentiment est plus fréquent chez les plus jeunes (58% chez les 18 à 29 ans), mais également chez les parents qui ont eu besoin du numérique pour continuer à assurer le suivi scolaire des enfants (59%) ou encore chez les télétravailleurs (71%).
Les populations les plus jeunes interrogées lors de l’enquête CAPUNI Crise ont également plus de mal à s’accorder des moments de déconnexion volontaire. En effet 45% des internautes de 18 à 29 ans ne déconnectaient jamais durant le confinement, contre 33% sur l’ensemble des internautes bretons.
Conclusion
Ainsi, certains internautes n’ont eu d’autres choix que d’intensifier leurs usages numériques pour pouvoir continuer de travailler ou encore suivre la scolarité de leurs enfants. Mais le numérique a aussi permis d’assurer une continuité des interactions sociales, du divertissement ou de l’apprentissage. Un usage accru du numérique est donc observé globalement dans ces différentes sphères. Les plus jeunes étaient déjà les plus connectés a priori et le confinement semble avoir amplifié cette tendance. L’hyper-connexion plus marquée chez les plus jeunes est-elle conjoncturelle (liée à la crise sanitaire et au confinement qui s’en est suivi) ou structurelle entraînant une modification plus profonde des interactions humaines ? Quelque chose que l’on pourra étudier avec les données de la prochaine enquête auprès des individus courant 2022.
Encadré sur l’enquête CAPUNI Crise
L’enquête CAPUNI Crise a été réalisée pour le compte du Groupement d’Intérêt Scientifique Marsouin. Soutenue par la Région Bretagne et l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires, « CAPUNI crise » a permis d’interroger par téléphone un échantillon représentatif de la population bretonne (1501 Bretons dont 1001 individus représentatifs de la population bretonne et un échantillon spécifique de 500 individus vivant en zones rurales isolées). La représentativité est assurée par la méthode des quotas sur les critères d’âge, de sexe, de catégorie socioprofessionnelle, de taille d’unité urbaine de résidence et de département.
L’enquête a porté sur les équipements et usages numériques avant et pendant le confinement, ainsi que sur l’école à la maison et le télétravail.
Les usages des très faibles échantillons ont été interprétés à la lumière des enquêtes antérieures ou des travaux qualitatifs des chercheurs de Marsouin.
Pour plus d’informations, https://www.marsouin.org/article1214.html.
Le Groupement d’Intérêt Scientifique Marsouin a été créé en 2002 à l’initiative du Conseil Régional de Bretagne. Il rassemble les équipes de recherche en sciences humaines et sociales des quatre universités bretonnes et de trois grandes écoles, soit 18 laboratoires, qui travaillent sur les usages et transformations numériques.
[2] Tous nos résultats ont été testés par régression logistique incluant comme variables explicatives l’âge, le sexe, le niveau d’étude, la catégorie d’aire urbaine, le fait de télétravailler ou non, d’assurer le suivi scolaire d’un enfant à la maison ou non.